Tilou

12 mesures pour l’éducation. Bravo? Pas si vite!

Le Ministre de l’Éducation nationale est passé à l’offensive, il y a quelques semaines. Sa cible : le laisser-aller du système éducatif ayitien. Trop d’écoles fonctionnent sans structure, sans instituteur qualifié… Trop de dépenses de l’État pour des examens officiels dont la valeur baisse d’années en année.

Le Ministre de l'Education Nationale Nesmy Manigat
Le Ministre de l’Education Nationale Nesmy Manigat | crédit Photo: www.radiotelevisioncaraibes.com

Pour y remédier, Monsieur le Ministre a donc proposé plusieurs mesures dont l’annonce a entrainé des réactions positives et lui ont même valu des félicitations.

Pour ma part, je ne trouve aucun motif de réjouissance dans cette annonce.

D’abord parce qu’elles ne sont présentées que comme des idées. Si études il y a eu, je n’ai pas eu vent de leurs divulgation ni de leur disponibilité en un quelconque endroit. Établir une liste de mesures est une chose. Que l’application de ces mesures soit étudiée, planifiée et budgétisée convenablement en est une autre. La « supervision d’écoles par un comité de gestion des enseignants » ne veut pas dire grand-chose si le rôle de ce comité ainsi que ses tâches pratiques de gestion ne sont pas énoncées. C’est de belles idées, peut-être, mais ça reste des idées.

Ensuite, parce que la plupart de ces idées, même appliquées, ne sauraient en elles-mêmes, constituées de mesures pour mettre de l’ordre dans le système. Ce n’est pas le « permis de fonctionnement » de l’école qui importe, mais les critères pour en bénéficier et le mécanisme actionné pour l’obtenir. Une licence que les professeurs pourraient se procurer par « rakèt», si ancré dans notre culture étatique, empirerait la situation.

Enfin parce que certaines des mesures semblent privilégier l’économie au véritable rehaussement de l’instruction ayitienne. Supprimer des Examens officiels inutiles ? C’est bien. Les épreuves de Baccalauréat sur deux années qui se suivent n’avaient vraiment pas de sens. En supprimer juste pour économiser de l’argent ? C’est dangereux. La preuve : La suppression des examens du certificat est une erreur grave. En résultera bien plus d’élèves à atteindre la 9e année fondamentale sans avoir le niveau requis. Les écoles «borlettes» se feront la part belle du sacrifice des parents qui sauront seulement après la 9e année que leur argent aura été mal dépensé. Dans l’état de notre système, plutôt que de reculer la première évaluation officielle, il aurait été même plus judicieux de l’avancer.

Loin de moi, cependant, l’intention d’être négatif. Je ne dis pas que les mesures annoncées seront inutiles ou que le Ministère ne saura pas les appliquer. Je mets simplement en garde contre tout euphorie exagérée pour certaines idées dont les mesures d’application sont encore inconnues et d’autres qui pourraient plutôt causer des dommages.

En attendant que le Ministère dissipe les doutes en dévoilant les détails d’un plan d’applications de ces nouvelles mesures, je souhaite à tous une bonne année scolaire.

Tilou

PS: Merci de ne pas récupérer cette réflexion citoyenne à des fins purement politiciennes


Fier!…mais de quoi?

Les gens éprouvent de la fierté pour des choses, des événements ou des situations bien différentes. Certaines se disent fières d’être Noirs, d’autres d’être Ayitiens. Maintenant, c’est au tour des femmes de se montrer fières de leur féminité.

Moi, je me sens fier d’avoir vu, une fois, une poule poursuivre et mordre un chien.

Le toutous était sorti de sa niche pour faire un tour lorsqu’il se retrouva nez à …(bon, la poule n’a pas vraiment un nez). En tout cas ils firent face. Sur le coup le chien paniqua et se mit à courir dans tous les sens. Évidemment la poule sauta sur l’occasion pour venger son espèce de toutes les misères qu’elle a pu endurer face aux chiens. Elle le pourchassa et, avec son petit bec, le fit hurler de douleur.

D’ accord, d’accord…ça n’a pas de sens que je puisse en éprouver un quelconque sentiment de fierté. Ce privilège ne peut revenir qu’à la SuperChicken. Et vous savez pourquoi? parce que je n’ai rien à voir avec le fait; parce qu’en aucune façon, mon influence n’a compté dans l’histoire.

On ne devrait être fier que de ce qui dépend, ou à dépendu à un moment, ou un autre, de nous.

L’écolier peut être fier d’une bonne note obtenue; le sportif, d’un record établi; le chercheur, d’une découverte. Il est normal qu’ils en soient orgueilleux (pas dans le mauvais sens du terme) parce qu’ils ont leur part de responsabilité dans la chose.

Mais on ne peut pas éprouver de la fierté pour la couleur de sa peau. (Bon, c’est vrai que l’exemple est mal choisi lorsque l’on tient compte de nos Bobistò*). Disons plutôt qu’être fier d’appartenir à une race n’a pas de sens, puisque on n’ y est pour rien. C’est pareil pour les ancêtres ou pour les résultats de nos sélections nationales.

Évidemment, on peut en être content. J’ai bien apprécié l’exploit de SuperChicken… Je saute de joie quand une équipe Ayitienne rapporte un trophée… Je suis reconnaissant aux aïeuls d’avoir effacer l’esclavage, etc.

Mais la fierté n’a pas lieu d’être. C’est ridicule d’en avoir parce qu’on est Noir ou Femme parce qu’on n’en décide pas et parce que ne pas l’être ne devrait pas faire de différence.

Tilou

* terme désignant les personnes (généralement les femmes) qui utilisent des produits de beauté pour s'éclaircir la peau


Par hasard

J’aurais dû écouter mes parents et ne jamais essayer la borlette, moi ! Franchement, c’est une histoire de fou.

Le problème c’est que les arguments de ma mère ne tenaient pas debout. Elle prétendait que c’était mal de jouer à la borlette* parce que ça relevait du hasard et que Dieu interdisait ce genre de pratique. Alors, quand j’ai su qu’elle tenait cela des églises chrétiennes qui, elles, organisent des rafles et tirages à longueur d’année, j’ai compris que prétendre que la pratique de la borlette était un péché n’avait aucun sens. J’ai donc décidé de m’investir à fond dans ce que beaucoup de compatriotes considèrent comme leur seul avenir.

Mais, personne ne m’avait dit que cela avoisinerait l’histoire des douze travaux d’Astérix !

La première semaine, sous les conseils de quelques amis experts et religieusement pratiquants de la borlette, je jouai quelques boules «malatchong**» qui, disaient-ils, sortiraient à coup sûr dans un des tirages de la semaine. Bon… nous avons eu 100 % d’échec, par hasard ! L’un de mes instructeurs, bizarrement, disait même qu’on avait raté de peu la grande cagnotte, parce qu’une fois le 17 fut tiré alors que nous avions misé sur le 18.

Après plusieurs semaines identiques à la première, je décidai de changer de méthode. Scientifique que je suis, je me suis mis aux calculs. Avec l’aide d’un oncle, j’appris de savantes combinaisons des chiffres du jour, du mois et de l’année aboutissant à un ensemble de numéros dont je devais choisir lesquels jouer. En plus, cette méthode était infaillible. Les trois lots du jour s’y trouvaient forcément. La galère, c’était de trouver dans la liste quelles boules jouer. Mon premier réflexe était de les jouer toutes. Hmm…pas sûr de faire de l’argent avec cette méthode ! S’y retrouvaient 98 des 100 numéros possibles. Je ne pouvais donc espérer gagner… Même par hasard.

Obtenir le tuyau de quelqu’un qui n’est plus de ce monde.

Alors que je commençais à perdre espoir, une cousine me révéla un secret : le seul moyen de pouvoir prédire ce qui va se passer par hasard, c’est d’obtenir le tuyau de quelqu’un qui n’est plus de ce monde. J’ai d’abord pensé aux protestants, eux qui chantent constamment à propos de ce monde qu’ils y sont sans en être. Mais il était plutôt question des morts. Il fallait que je pense intensément à un membre de ma famille qui me chérissait beaucoup et qui avait déjà fait le grand saut de l’autre côté de la vie. Seulement ça. Rien que ça ! Et puis dans un songe, il viendrait m’indiquer quelle boule jouer pour le prochain tirage. (bon bagay !) Qui aurait pu croire que c’était aussi simple, par hasard ?

Évidemment, je m’empressai d’aller au lit pour rencontrer mon grand-père en songe. Je rêvai en effet de lui. Il ne me donna aucun numéro. C’est alors que ma cousine m’expliqua comment cela fonctionnait réellement. Je devais, selon elle, me rappeler tout ce qu’il y avait dans le rêve et dénicher les numéros correspondant dans un «tchala***» se trouvant au dos d’un almanach. Par exemple, si j’avais rêvé d’un chien, j’aurais à jouer le numéro 15. Et le 74 pour un chat. Ah ! Je vous assure, j’étais parti pour une bonne trentaine de boules, moi, qui venais de rêver que mon grand-père me faisait visiter un zoo.

Et puis, mon grand-père, n’aurait-il pas pu faire plus simple que ça ? J’aurais pourtant compris hein, s’il m’avait dit « tu dois jouer 38 ». J’aurais alors joué 38 ! Franchement!?

J’ai ainsi tout essayé. Rien n’a marché, c’est à perdre la boule! Finalement, n’est-il plus possible de gagner à la borlette… par hasard ?

Tilou

*Borlette:Jeu de hasard de type loterie, loto, etc.
**Maltchong:Numéro faisant la Une comme étant sûr d'être tiré.*** Tchala : Liste faisant correspondre les numéros tirés à la borlette à des objets ou situations de la vie courante